La famille de Joseph Guerdner, le gitan abattu en mai 2008 alors qu’il tentait de fuit sa garde à vue, a laissé éclater sa rage quand la cour d'Assises du Var a blanchi le gendarme en question, Christophe Monchal.
Jusqu’ici, la famille de Joseph Guerdner avait fait preuve de beaucoup de retenue et d'une très grande dignité. Mais à l’énoncé du verdict, les proches de ce gitan de 27 ans, abattu en mai 2008 par un gendarme alors qu’il tentait de fuir sa garde à vue, n’ont pu contenir leur exaspération, mélange de désappointement et d'aigreur accumulée. «Criminel, assassin, elle est mal faite la justice !», a hurlé la mère de Joseph, en pleurs. «Les gendarmes, ils ont le droit de tuer, nous aussi on va les tuer», a ajouté Micheline Guerdner, ses cris couvrant les derniers mots du président de la cour d’Assises du Var. A la sortie du tribunal de Draguignan, la maman de la victime s’en est même pris physiquement aux policiers présents sur place. «Vous n’êtes pas des hommes ! Vous avez abattu de sang froid un homme, mon enfant», leur a-t-elle lancé en donnant des coups avec ses bras.
«On a le sentiment d'être vraiment pris pour de la merde», a renchéri la soeur du gitan, Mauricette Guerdner. Et aux policiers pris à partie par sa mère, elle leur a demandé de «se mettre à la place d’un père et d’une mère» qui ont perdu un enfant, «abattu de trois balles dans le dos» alors qu’il était en garde à vue. «Tu serais content toi ? Tu serais content ? Alors mets-toi à leur place». «On nous a pris pour des cons depuis le début. Vous avez gagné une bataille, les gars, mais vous n'avez pas gagné la guerre !», a ajouté le père. Quant à l’avocate de la famille, elle a dit «trouver cette décision curieuse» au micro d’i>Télé. «Mais c’est une décision de justice je n’ai pas à la juger», a-t-elle nuancé. Me Régine Ciccolini s’est dite surprise car comme elle le défend depuis le début, elle estime que les «conditions de tir n’étaient pas réunies» quand le maréchal Christophe Monchal a fait feu.
"Permis de tuer"
Les jurés en ont décidé autrement, suivant l’avis de l’avocat général, Philippe Guémas, qui sans demander explicitement l’acquittement, avait estimé que l’agent Monchal «ne pouvait pas être pénalement condamné pour les faits qui lui sont reprochés» étant donné qu’il avait fait usage de son arme dans le respect de la loi. (cf encadré) «Il ne s'agit pas de délivrer un permis de tuer, avait-il répondu à Me Ciccolini, reprenant ses termes, mais de constater que Christophe Monchal a agi conformément à ce qui lui a été enseigné. Il a agi dans le cadre légal, il n'a pas agi pour commettre une infraction pénale.»
Les faits remontent à il y a plus de deux ans. Le 22 mai 2008, Joseph Guerdner, marié et père de trois enfants, est arrêté alors qu’il se rend à son contrôle judiciaire, pour avoir foncé sur un véhicule de gendarmerie deux ans auparavant. Les enquêteurs le soupçonnent d’avoir participé à l’agression à main armée et la séquestration d’un routier un mois auparavant. Un pistolet 11,43 et des munitions sont découvertes dans son véhicule: il est placé en garde à vue et transféré à la compagnie de Draguignan. Le gitan, qui vivait dans un campement à Brignoles, nie les faits. Le 23 mai, vers 21h30, Guerdner demande la permission de fumer une cigarette. Il l’obtient. Le maréchal Christophe Monchal, décrit comme «calme et posé» par ses collègues, l’accompagne dans la cage d’escalier dont la fenêtre est entrebâillée.
Mais alors que la minuterie s’arrête, l’homme saute malgré ses menottes et les 4,60 mètres qui le séparent du sol. Il court ; le gendarme tire à sept reprises sur le fugitif. Trois balles l’atteignent, dont une mortellement, à la poitrine. Le fugitif réussit malgré tout à franchir un grillage de deux mètres et se réfugie dans un arbre de l’institution religieuse voisine où il sera découvert agonisant. Joseph Guerdner était bien connu des services de police, notamment pour des vols et violences commises depuis 1996. On ignore en revanche s’il était vraiment complice ou non de la séquestration violente, pour laquelle trois personnes ont depuis écopé de 5 à 9 ans de prison. Le maréchal Monchal, qui s’est dit «désolé», était poursuivi pour «coups mortels par personne dépositaire de l'autorité publique dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions». Il encourait théoriquement vingt ans de réclusion criminelle.
Source: parismatch.com